Notes de peinture | Ft. Luka Couffaine

Ils n'étaient pas pareils, Luka et lui, mais pour autant, Misha avait la sensation que, bien que différents, ils étaient semblables. Et du plus loin qu'il pouvait s'en souvenir, c'était probablement la première fois qu'il rencontrait quelqu'un de ce genre. Quand bien même ils ne perçoivent pas les choses de la même façon - de manière concrète - ils partageaient tout deux ce petit plus que les autres ne comprenaient pas. Et il n'y avait pas besoin de plus. Parfois, simplement ne pas se sentir totalement seul dans ses différences était agréable.

Vincent le comprenait. Tout du moins en partie, et le rouquin en était persuadé. Mais Luka avait ce petit quelque chose de différent qui faisait qu'il comprenait tout ce qui était autour. Les regards incompréhensifs ou moqueurs. Les termes de folie et de menteur probablement aussi. Misha souriait, continuait d'acquiescer aux paroles de l'autre jeune.

Oui, l'art était une langue à part entière. Peut-être même l'une des premières de l'humanité. Et plus que cela, c'était une langue internationale. Qu'importe les frontières, il suffit d'apprendre à écouter et à voir pour pouvoir la parler. « Beaucoup ont tendance à l'oublier oui. L'art est au centre de tout. Et même des choses les plus minimes. Quoi qu'on en dise, il est fondateur de la société. Les premiers Hommes se regroupaient autour des peintures pour s'organiser lors des chasses, et aujourd'hui nous nous regroupons autour de bien des choses qui pourrait toujours y être associé. » Les acteurs, les publicités, les concerts, dans tout cela se trouvait une part du domaine artistique. Tous ne le comprenait pas, à tel point qu'il semble même inexistant pour qui ne veut pas le voir, mais l'art a toujours été présent et il le sera toujours. Et ce même s'il ne passe plus autant par les mêmes medium qu'à une époque. Que la belle musique et la belle peinture a été délaissé par de nombreuses personnes était une chose qui désolait quelque peu Misha, mais s'il fallait se rassurer, il suffisait de se dire que tout cela n'avait pas disparu pour autant.

« Je suis bien d'accord. » L'étudiant hochait doucement de la tête. « Je suis persuadé que si tout cela disparaissait, le monde se rendrait compte d'a quel point l'art, la musique, les couleurs, tout ça était au coeur du monde. » Après tout, n'était-ce pas uniquement lorsque l'on perdait quelque chose que l'on se rendait réellement compte d'a quel point cela était précieux ?

Misha appréciait réellement entendre les commentaires de Luka. Ses réflexions étaient intéressantes et pertinentes. Elles n'hésitaient pas à penser et réfléchir les différents concepts qu'ils avaient pu évoquer jusque là. Et le rouquin hochait la tête avec un petit sourire sur les lèvres. Non, ce n'était définitivement pas des conversations qu'il pouvait avoir avec tout le monde. Et, à vrai dire, les personnes avec qui ces dernières étaient possibles n'étaient pas les plus nombreuses.

Rares étaient ceux qui avaient en eux une telle sensibilité à l'art. Mais au vue de la personne face à qui il était, il ne devrait pas être surprit. Après tout, les deux se complétaient plutôt pas mal.

Alors quand le jeune homme avait reprit la parole pour parler des couleurs dans le temps, et notamment au début de l'art, l'étudiant en art avait été ravi d'entendre sa remarque. Misha avait l'impression de résonner avec les pensées de Luka. Ils étaient sur la même longueur d'onde. Finalement, l'autre jeune lui avait proposé de poursuivre la visite de l'exposition à ses côtés. Le sourire du rouquin s'était légèrement agrandit. « Avec plaisir ! Ca me fera un peu bouger, j'commençais à en avoir un peu marre de faire le poteau à côté haha. » Se dégourdir les jambes ne lui ferait pas de mal. Et puis il pourrait continuer d'être en bonne compagnie par la même occasion. Tout bénef'.

« Je te suis alors. N'hésite pas si t'as des questions, j'suis pas dans la tête de mes camarades, mais j'peux p't'être t'éclairer sur deux ou trois trucs quand même si t'as besoin. » Ou même simplement donner son avis. Pas uniquement en tant que peintre également, mais que spectateur. D'autant plus qu'il avait eu le temps de les voir, les créations de ses camarades de promotion.

Luka n'avait pas tort, bouger un peu lui ferait certainement pas de mal. Alors en réponse, le rouquin avait sourit plus largement en laissant s'échapper un petit rire. « Pas faux haha. » Comme il l'avait dit plus tôt, Misha se laissa guider pour aller au rythme de la visite de l'autre jeune. Après tout, c'était lui qui visitait, il ne faisait que l'accompagner afin que l'un comme l'autre puisse profiter d'un peu de compagnie tout en discutant art, peinture et musique. Ainsi, il le suivit alors qu'il pénétrait dans une autre pièce où ses camarades avaient exposés leurs travaux ayant liens avec les percussions.

Le visiteur s'arrêta devant une toile qui mettait en scène une percussion entouré de couleurs. L'étudiant en art se souvenait avoir vu la pièce quelque fois, toujours attiré par les oeuvres colorées. C'était une réussite de ce côté là. Les couleurs n'avaient pas le même sens que celles qu'il mettait lui-même dans ses tableaux, mais elles n'étaient pas de trop - quoi que puisse en dire certains professeurs un peu trop vieux. Le rouquin esquissa un sourire face à la remarque - et interrogation - de Luka. « C'est parce que nos couleurs ne viennent pas des mêmes endroits et n'ont pas le même sens. Je peins la musique. Voilà ce que disent mes couleurs, des notes, des airs, un rythme. Ici, les couleurs accompagnent l'instrument. Elles ne sont pas produite par lui. »

Le jeune homme pencha légèrement la tête sur le côté, songeur. « Comme dit, ce que je vais dire n'est pas forcément la bonne réponse, c'est simplement une hypothèse. Je ne suis pas dans la tête de l'auteur. Mais je pense que c'est simplement une représentation d'un ressenti. La batterie est un instrument fort. Mais je pense que tu sauras mieux parler de ça haha, c'est pas moi l'expert en musique. Mais pour moi la batterie c'est un instrument qui représente bien les émotions fortes ou les battements d'un coeur. D'où une représentation à travers des couleurs. Les battements de la rage, de la peur, de la joie aussi. On retrouve pas mal de chose. » C'est comme ça qu'il imaginait ces couleurs.

Ou peut être qu'il extrapolait simplement au vue de sa propre sensibilité. C'était là la magie de l'art. Existait-il seulement une bonne réponse ? Et si oui, en existait-il seulement une seule ?