Objection ! [PV Lisbeth]

Lisbeth ouvrit une porte qu’elle avait souvent laissé fermé. Comment expliquer qu’aujourd’hui elle parlait aussi facilement de choses qui l’ont détruite tant de fois ? Elle ne savait pas vraiment, mais elle avait le sentiment que son interlocutrice avait besoin de ce temps pour ouvrir son cœur et comprendre les possibilités possibles de chaque chose. Évidemment, son but n’était pas de la rendre triste ou incertaine, mais plutôt de répondre à ses interrogations et à ses peurs avec une réflexion posée et sans jugement. Qui était-elle dans tous les cas pour imaginer une seconde d’avoir le droit de juger la brune à côté d’elle ?

Chacun avait ses démons et ses moments de faiblesse, personne ne pouvait juger ou réprimander ce genre de chose. Souriant en parlant ouvertement, elle sentait que la jeune femme était à l’écoute, elle le ressentait. C’était important pour elle d’entendre ce genre de chose, cela l’aiderait sans doute à avancer et à appréhender les choses différemment. Lisbeth cherchait à expliquer ses propos de façon posée et neutre, rigolant parfois, souriante d’autres fois, elle était vraiment ouverte à la discussion ce soir.

Toujours dans la bienveillance, elle lui montra une photo de sa famille adoptive, en expliquant les choix de ceux-ci et en montrant que parfois, même une adoption offre tout autant de bonheur. Mais malgré tout, elle connaissait ce genre de sentiment, elle l’avait ressenti lorsqu’elle était en couple avec sa première conquête. Elles s’aimaient d’un amour puissant, cependant son envie d’avoir un enfant à elle avait été plus fort. Elle regrettait parfois le choix d’avoir abandonné cette histoire, mais au final, c’était pour le mieux.

Les minutes passèrent, Lisbeth racontait son histoire, ses mésaventures et ses moments de bonheur et de tristesse dans un silence respectueux de la part de la brune. Elle ne voulait pas brusquer la conversation, préférant que son interlocutrice s’ouvre à la borgne d’elle-même.

Puis après quelques paroles, la jeune femme assise à côté d’elle prit la parole. Elle comprit à ses propos qu’elle voulait vivre cela, que c’était important pour elle, ce qui valida son ressenti sur les pensées de la brunette. Lisbeth but une nouvelle gorgée de son liquide alcoolique et plongea son regard dans la substance liquéfiée en souriant finalement.
           

       
Souriant doucement, elle quitta du regard son verre pour récupérer la photo et la regarda avec un petit sourire d’innocence et de naïveté avant de la ranger avec précaution dans son réceptacle.

Raph reprit la parole en pointant du doigt le fait qu’elle avait été adoptée. Cela ne la dérange pas d’en parler, bien au contraire, elle était vraiment reconnaissante à sa famille adoptive d’avoir été avec elle et de l’avoir acceptée comme elle était avec son mauvais caractère.



Lisbeth prit une petite pause, jouant avec son verre machinalement. Quand elle se rappelait de son passé, cette partie-là était vraiment la plus douloureuse, rien ne montrait qu’elle était destinée à finir ainsi, professeur avec un revenu modeste. Mais la vie est parfois bien joueuse et cruelle.



Lisbeth a bu une nouvelle gorgée, son cœur lui faisait mal, mais elle ne pouvait pas s’arrêter, pas ainsi, c’était trop tard, elle devait aller jusqu’au bout et peut-être cela libérera un peu son cœur du poids qui la pèse ? Elle reposa son verre et regarda devant elle un long moment, ses mains tournant le verre sans vraiment s’en rendre compte.



La borgne eut de nouveau un rire amer avant de s’adoucir en parlant de sa famille d’accueil.



L’alcool à vraiment un don pour permettre de s’ouvrir aux gens. Souriant avec plus de douceur et de fierté, elle leva son regard vers la brune et la plongea son oeil valide dans l’un de sien en souriant.



Elle finit son verre après cette tirade et s’étira un peu avant de craquer ses doigts par habitude. Elle posa son coude sur le comptoir et déposa sa joue au creux de sa main pour regarder la brune.

Assise là, à boire encore un autre verre, la jeune professeur se rappelait de souvenirs bien lointains, des choses qu’elle n’aurait imaginé se rappeler. Tout était si loin et pourtant, à l’instant T, tout revenait comme une petite tape sur la joue. On ne peut pas fuir son histoire, c’est quelque chose que la jeune borgne avait bien compris. La vie reste une garce, quoi qu’il arrive… Mais parfois, elle nous laisse un peu de répit, comme actuellement… Bon à part le coup de sa voiture, évidemment !

Enfin là n’était pas vraiment le lieu ni l’endroit de se morfondre sur son passé douloureux digne des plus grands drama. Aujourd’hui, une jeune femme avait besoin d’une oreille attentive et de conseils, alors Lisbeth n’allait pas parler que d’elle… Même si son expérience amène à ce qu’elle ramène un peu de chose sur elle…C’est le problème d’avoir vécu une vie pleine de chose diverse et variés. On apprend de nos erreurs et on peut facilement exprimer des exemples et des solutions lorsque d’autres ressentent la même difficulté. C’était son côté réfléchi et mature qui permettait à Lisbeth de ne jamais couler, même si parfois, c’était difficile.

Lisbeth sentait que la brune en face d’elle avait énormément de questions et de demandes sur des points assez spécifiques. Elle avait bien deviné que son homologue, assise à côté d’elle vivait des choses qu’elle avait pu vivre dans sa jeunesse. Elle était touchée et un peu inquiète pour Raph…C’est pour cela qu’elle faisait tout pour donner le plus d’information possible, afin que la jeune femme puisse avoir le plus de carte possible.

Se sentant écoutée, Lisbeth ne cacha pas grand-chose à la brunette, bien au contraire, la moindre de ses questions, la jeune borgne y répondit avec le plus de précision possible, même si cela lui remonterait des souvenirs bien douloureux. Cela lui faisait plaisir de pouvoir aider une autre personne, espérant pouvoir la soulager un peu du poids et du doute qui la ronge. Après tout, Lisbeth connaissait mieux que personne la tristesse et la destruction de perdre un enfant, même si cela n’est évidemment pas tout à fait pareille que Raph.

Le silence régna pendant quelques instants avant que la brune ne le brise d’un demi-sourire pour la remercier. Lisbeth était honnête sur ses paroles, une bonne mère se poserait ce genre de question, cherchant à être la meilleure, devant répondre à des problématiques difficile. C’étaient les signes d’un bon instant maternel. Souriant Lisbeth ne répondit rien d’autre, elle voyait dans ses yeux qu’elle allait mieux et qu’elle allait pouvoir avancer doucement. Pour ce qui est du reste, Lisbeth n’était pas médium, mais elle imaginait bien que son homologue féminin n’avait pas encore le courage nécessaire pour parler des choses plus profondes.

La nature humaine est bien particulière, n’est ce pas ? Mais la vie est tellement plus belle quand y a du malheur. C’est ce que Lisbeth a appris au fur et à mesure que les années sont passées. Après le malheur qui la détruit, elle a pu goûter au bonheur véritable et sincère. Mais cela, elle ne le dira pas. Raph n’était sûrement pas prête à entendre cela, mais le jour où elle en prendra conscience, beaucoup de choses changeront pour elle, Lisbeth en était sûre.

Puis la jeune femme se leva de son siège, déposa un billet sur le comptoir et la remercia pour tout. Lisbeth secoua la tête avant de dire d’un sourire sincère et de partager.
           

       
Lisbeth lui fit un petit salut avec son verre en souriant grandement et une fois son interlocutrice disparut dans la pénombre, la jeune femme tourna son regard vers son verre et soupira fortement. Elle avait bien besoin d’un autre verre, mais il fallait rentrer maintenant…Et qui la ramènerait si jamais il lui arrivait quelque chose ?

Finissant son dernier verre pensivement, son regard se perdit par-delà la fenêtre. La nuit avait finalement pris tout le ciel, les lumières des lampadaires commençaient à répandre leurs lueurs partout. Ce soir, elle allait accepter les souvenirs douloureux, elle allait accepter la faible femme qu’elle a été, elle l’accepterait les bras ouverts puis…Reprendra sa vie normalement le lendemain.

C’est ainsi qu’après quelques dizaines de minutes perdues dans ses pensées, elle prit son manteau pour le remettre et sortit du bar, reprit la route et une fois rentrée, décida de marcher un peu dans le parc non loin.



Regardant le ciel étoilé, Lisbeth resta ainsi un moment… La vie est pleine de miracle n’est ce pas ? Est-ce que ce miracle finira par toucher la jeune brune du bar ? Lisbeth le souhaitait….