Un loup caché dans le Paradisier de Carola

La tenue de Theodore : https://i.pinimg.com/originals/2e/0a/34/2e0a34da7ea0ff049a1943637376b0cf.jpg

Theodore marche à fière allure dans les rues de pavées du reste de Paris. Le soleil est radieux et réchauffe de sa grande lueur le visage du jeune homme. La rue est vivante, bruyante, les passants étaient curieux et dans cette rue se trouvait de nombreuses boutiques artisanales aux allures d’une campagne non loin de la capitale. Il y avait des bars, des restaurants à foison et un cinéma dont on pouvait se demander s’il était réellement possible de projeter un film dans un espace aussi étroit. L’oiseau au beau plumage se rapprochait de son nid, de son territoire. Il prit une grande inspiration et ralentie le pas. Le voilà devant l’entrée de son casino : « Le Paradisier de Carola »

Les portes électriques coulissantes s’ouvrent à son arrivée et se referment aussitôt derrière lui. A l’intérieur se trouvait d’abord un « SAS » où deux vigiles montaient la garde. Tout autour de lui les murs étaient noir ébène, si sombre qu’ils semblaient absorber la moindre lumière. Cette impression volontaire permettait aux clients de couper leur lien avec le monde réel. Juste derrière les deux vigiles, des rideaux tout aussi ténébreux parsemés de strass blanc semblable à des diamants, donnaient l’impression de se trouver face à un ciel étoilé. Les deux grands hommes à la carrure imposante saluèrent avec respect leur patron avant de lui écarter les rideaux pour qu’il puisse entrer. Ses pas ne faisaient plus aucun bruit, le son était absorbé par la moquette épaisse. Theodore se trouvait désormais au niveau de l’accueil et commença à se présenter ainsi qu’à saluer tous ses employés. Il passa ensuite sur la droite où se trouvait une porte, bien caché et interdit aux visiteurs. Cette salle comportait à nouveau différentes pièces réservées au repos du personnel, des toilettes, un poste de surveillance et un vestiaire. Il se changea et se vêtu de sa tenue : Un ensemble en cuir noir, bordé de dorure et de pierres aux couleurs vives. Il portait également une cape dont l’intérieur avait les couleurs d’une galaxie. Il se posa sur une chaise et commença à se maquiller avant de mettre le reste de sa tenue. Il se peint le côté droit de son visage, un fond bleu nuit qui vire au violet tout comme l’intérieur de son col, sous son œil une figure bleue aussi vive que le saphir. Il ajouta à l’aide d’un parfumeur des paillettes sur cette partie de visage ainsi que dans ses cheveux d’or.

Il se leva, enfila ses gants en cuir et le voilà prêt. L’extravagance de Theodore allait de pair avec son intelligence. Observateur, ingénieux, il n’avait pas peur des grands projets et avec ses convictions qui étaient celui de rendre un monde meilleur et fantastique, Theodore avait crée de toute pièce ce casino. Il avança de bonne humeur un sourire charmeur sur le visage, le jeune homme était comme soulevé par une espèce de vol, et son allure était comme un planement d'oiseau majestueux.

Le voilà en plein centre de son casino, il y avait de nombreuse table, de jeu de carte, de machine et malgré l’heure le monde était présent. Masqué, orné de bijoux et de parure tout aussi extravagante que lui, cela le rendait heureux de voir que son esprit s’était transmis et était respecté par la clientèle. Nombreuses sont les fois où il fut surpris par des costumes des plus originaux : des plumes, des chaines, des velours, certains étaient mêmes lumineux et d’autres phosphorescent. Bref, son casino baignait dans son univers fantaisiste et magique.
Il salua ses plus fidèles clients et accueillait d’un sourire charmeur les nouveaux et plus timides d’entre eux. Theodore était apprécié et respecté, il semblait être le maitre de ce monde qu’il avait construit. Pourtant, quelque chose le tracassait depuis plus de deux semaines déjà et son inquiétude s’était amplifiée les trois derniers jours. Un homme gagnait bien trop souvent et dans un casino, un grand gagnant était synonyme de tricherie. Theodore n’était pas un arnaqueur et son établissement était bien équilibré pour qu’il puisse apporter de la joie pour les clients et du gain pour le gérant. Un homme plutôt âgé au rire gras et dont son visage était marqué par sa beuverie, il avait un dos large et un regard confiant dont Theodore distinguait une lumière sournoise. Il n’aimait pas cela, il ne le supportait pas que quelqu’un contrôle son monde contre son gré. Mais Theodore n’avait pas toutes les preuves pour le mettre à la porte et craignait fortement d’attirer une attention mauvaise sur son compte. Il avait peur de décevoir ses clients. C’est donc pour cela qu’il avait choisi de faire appel a une huissière il y a une semaine et avait prit rendez-vous pour aujourd’hui. Personne n’était au courant à part les vigiles.

Le jeune oiseau avait repéré sa proie, son costume était élégant et son allure était tel qu’il ressemblait à un pirate, orné de plume et de bijoux en or, il ne lui manquait plus qu’un crochet à la place de sa main… Ses cheveux étaient poivre-sel, mi long et quelque peu bouclé. En plus de gagner, il avait attiré l’attention dont des jeunes demoiselles cachées derrière leur masque vénitien. Theodore n’appréciait pas du tout son arrogance.

« Celui-là va finir mangé par les crocodiles… Je suis sûr qu’il me cache quelque chose et il sait que je ne suis pas dupe… Voyons qui est le plus rusé de nous tient ! » dit-il à lui-même à voix basse

Theodore était rusé et avec une once de mauvaise intention. Il regarda sa montre, il était l’heure d’accueillir sa future alliée. Il tourna les talons pour se diriger de nouveau vers l’entrée, ouvrit d’un geste de la main le rideau étoilé et…

« Madame, bienvenue dans le Paradisier de Carola ! » dit-il un air enjoué avec un sourire presque enfantin.

Theodore vit le regard étonné de la jeune femme. Elle ne devait peut-être pas connaitre cet endroit ou ne devait pas s’attendre à cela. Theodore profita de sa réaction pour gonfler son égo et ajouta

« Je me nomme Theodore Scott, je suis le créateur et le patron de ce casino. Nous nous sommes contactés à propos d’un potentiel fraudeur… » Il attendit que la jeune femme se soit habituée au lieu pour lui ouvrir le rideau scintillant et l’invita à poursuivre la visite.

« Êtes-vous déjà venu nous rendre visite ? Votre visage ne m’est pas familier… Et je le sais, car un si joli regard comme le vôtre ne s’oublie pas ! Et je sais parfaitement qu’elle tenue le mettrait en valeur… J’ai un collier qui vous irait à merveille ! » dit-il avec franchise et d’un naturel déconcertant.

« J'ai tout ce qu'il faut à la maison, merci. »

Theodore aurait pu se vexer de cette réponse mais il ne le fut pas, il fit une simple moue, un peu déçu, puis son attention fut tournée vers son problème le faisant oublier ce qui s’était dit plus tôt.

Il l’avait invité à entrer dans son monde. Theodore avait l’habitude de la réaction que pouvait avoir ses clients lors de leur première visite. Surprit, émerveillé, ou encore indigné face à l’exubérance vestimentaires des habitués. Son regard cristallin se posa sur celui de l’huissière, qui ne semblait pas remarquer que le jeune homme surveillait avec attention sa réaction. Theodore haussa un sourcil, cette dernière ne semblait pas affectée par son monde, bien au contraire, au fur et à mesure qu’ils avancèrent, les traits de son visage se tendirent, exprimant un certain mépris envers ceux qui jouaient aux machines. Peut-être se trompait-il ?

« Est-il présent aujourd'hui ? Si oui, est-il toujours à la même machine ? »

« Il devrait arriver dans une heure. Il joue toujours à la même machine effectivement je vais vous la présenter mais avant… » finit-il en chuchotant.

Theodore se retourna vers elle, sa cape flottait avec légèreté suivant les pas gracieux d’un bon danseur.

« … J’aimerai que votre intervention reste discrète. Je ne sais pas si vous l’avez remarqué mais mes oiseaux se retournent vers vous et semblent quelques peu… comment dire… offensés, apeurés même. Ce n’est pas contre vous bien évidemment mais, je pense que nous allons devoir faire un tour dans mes salles. Cela nous permettra aussi de visionner les vidéos de surveillance puis ensuite de vous présenter la machine en question le temps que le suspect arrive. Qu’en dites-vous ? »

Theodore n’avait pas précisé qu’il avait l’intention de lui apporter une touche plus encline à son monde. Elle portait une chemise blanche et une jupe rouge ravissante. Il ne suffisait que de quelques accessoires d’une élégance mondaine pour se fondre dans la masse. Cependant Theodore devra faire preuve de finesse et subtilité car la jeune femme semblait bien sérieuse et rigide dans sa position d’huissière. Cela était tout à fait compréhensible. L’homme à la chevelure d’or était face à un dilemme : comment la faire passer inaperçue face à ses clients et au potentiel suspect tout en la convainquant de porter des accessoires ? M. Scott faisait tourner ses méninges et toutes les possibilités qu’il tentait d’anticiper se terminaient pas un échec cuisant ou par une réprimande de la jeune femme. Cela pourrait être mal placé de sa part mais… Son monde était exigeant, pour tout  ceux qui entraient afin de préserver cet équilibre.

« Si vous voulez bien me suivre… »

Il mena la marche, tout en saluant les joueurs présents. C’était principalement eux qui souhaitaient le bonjour au jeune homme, certains voulait avoir une intention intime de la part du patron et étaient prêt à lui parler pendant des heures… Mais Le jeune patron était bien plus malin pour ne pas tomber dedans.

Il monta les marches d’un escaliers bien caché privé, suivis de près par l’huissière. Une fois arrivés en haut, il ne restait plus que quelques pas pour prendre une porte à droite et entrer dans une salle de surveillance où étaient enregistré tout ce qu’il se passait dans le casino. Les vidéos étaient ensuite sauvegardés sur un disque dur externe. Deux personnes se trouvaient dans cette salle, Theodore ne pouvant pas s’occuper de ce travail. Il n’avait pas le temps de tout visionner et avait donc engagé deux professionnels.

« Henri et Annie, voulez-vous bien montrer à… Madame Despentes ce que je vous ai demandé de mettre de côté ? »

Notre Paradisier avait fait l’effort de retenir le nom de famille de l’huissière qui pourtant, ne s’était pas encore présenté. Il l’avait tout simplement reconnu une fois arrivée. Tel un gentleman un peu charmeur, il invita la jeune femme aux lèvres pourpre de s’avancer pour visionner les vidéos de surveillance. L'élégance de ses manières, l'allure vive de son humeur, contrastaient avec la rigidité et le calme de Mme Despentes.


Sur les vidéos, l’homme qui se nommait Guillaume se dirigeait vers la machine à sous, toujours à la même heure. Ses gestes étaient identiques, des regards sur le côté, une veste rouge sang plutôt épaisse, des chaussures ailées. Tout semblait des plus normal, mais quelque chose échappait des yeux de Theodore et cela l’agaçait au plus haut point !

Avait-elle vu un détail qui lui échappait ?